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Jour d'élection

REINES D’ARLES

Chapeau
L’élection de la Reine d’Arles et de ses Demoiselles d’honneur est organisée par le comité des fêtes d’Arles. Depuis les années 1980, de nombreux changements ont eu lieu, significatifs à la fois d’une adaptation permanente aux moyens de communication contemporains et d’une réorientation des préoccupations identitaires.
Corps

Postuler, concourir, être sélectionnée

Le retrait puis le dépôt du dossier de candidature fait partie de la ritualisation mise en place. Les candidatures sont examinées par une commission, qui vérifie que leur contenu est conforme et que les critères sont respectés (âge, nationalité, lieu de naissance ou celui des ancêtres, chevelure assez longue pour se coiffer).

Le jury qui fait passer les épreuves et procède au vote final comprend sept personnes, dont une ancienne reine, un représentant des institutions culturelles d’Arles et des personnalités emblématiques de la culture locale. Deux journées d’épreuves de présélection visent à établir la liste des sept jeunes filles retenues : épreuve écrite de culture régionale ; épreuve de coiffure, la pose du ruban étant la pierre angulaire de l’habillage de l’Arlésienne ; épreuve de défilé, à la suite duquel les candidates se voient attribuer une note de prestance et d’allure; enfin épreuves orales.

L’élection a lieu le 1er mai, parmi les sept candidates retenues, qui passent chacune un entretien avec le jury réuni. La reine est désignée dans la foulée et présentée, ainsi que les demoiselles d’honneur, par le maire d’Arles au balcon de l’Hôtel de Ville. La foule réunie sur la place en contrebas attend le traditionnel « Pople d’Arle, veici ta rèino ! » lancé par le premier magistrat. Le règne est intronisé en juillet lors d’une cérémonie publique au théâtre antique d’Arles.

L'annonce du nom de la Reine
L'annonce, au balcon de l'Hôtel de ville
L'annonce, au balcon de l'Hôtel de ville

 

Devenir et être reine : suivre un chemin tracé

Tous les entretiens avec les candidates ont fait émerger l’idée d’un parcours et d’un « cheminement » de plusieurs années, ponctué par de nombreuses étapes, quasiment identiques pour toutes. Premier costume, porté toute petite, inscription dans un groupe de « maintenance » des traditions, prise du ruban aux Saintes-Maries-de-la-Mer… jusqu’au dépôt du dossier pour se présenter à l’élection.

Journée d'hommage aux reines
Journée d'hommage aux reines, avril 2008 © Florie Martel
Journée d'hommage aux reines, avril 2008 © Florie Martel

Cette évolution suit les âges de la vie des jeunes filles, qui deviennent alors des femmes… mais des femmes arlésiennes de surcroît. Accéder au titre de Reine d’Arles représente un véritable « engagement », un « accomplissement ».

« Je me présente à l’élection parce que je suis née dans les traditions, c’est ma vie de tous les jours, je vois des taureaux au travail, le week-end je m’habille, je suis dans ce milieu depuis toujours donc pour moi c’est une étape de ma vie ».

Transmission

Les familles jouent un rôle capital dans la préparation et le soutien à la candidate, mais les groupes folkloriques, dépositaires et passeurs de traditions, sont aujourd’hui des institutions ayant un rôle essentiel dans l’accumulation et la gestion d’un certain « capital social et culturel », nécessaire aux candidates à l’élection.

Si chacun se défend d’élire une Reine de beauté, tout le monde a son opinion sur l’allure physique et les valeurs morales que doit avoir une reine, ainsi que sur une origine géographique privilégiée. Le tout est donc pour les candidates d’arriver à faire correspondre leur représentation de ce modèle avec leur identité propre.

Se coiffer, coudre, pour être soi

Le 20e règne, Fête du costume, juillet 2008
Le 20e règne, Fête du costume, juillet 2008, © Florie Martel
Le 20e règne, Fête du costume, juillet 2008, © Florie Martel

Partie intégrante du costume, la coiffe arlésienne a ses contraintes (une chevelure longue) et mobilise un savoir-faire spécifique. L’autonomie dans le montage de la coiffe est primordiale pour des jeunes femmes appelées à s’habiller plus d’une centaine de fois par an au cours du règne.

Le costume se distingue par le fait qu’il est créé « sur mesure » : il est unique et totalement adapté à la personne qui le porte. La confection monopolise le temps et l’énergie des femmes, en famille ou entre amies, mais permet de rassembler et transmettre. Faire son costume soi-même représente une fierté et prouve l’authenticité de la pratique.

« Les fichus je les brode avec ma grand-mère, ça a une autre valeur et je pense que ça change le port aussi, c’est une autre fierté, pour moi c’est vraiment important et même primordial de pouvoir faire les costumes moi-même et en somme de savoir ce que je porte aussi et la valeur de ce que j’ai, du coup ce n’est pas une valeur financière mais une valeur presque sentimentale »

La sensation que procure le port du costume d’Arlésienne est décrite comme particulière. Le costume fait partie de la beauté des Arlésiennes, il semble révéler la véritable personnalité de celle qui le porte et permet de se dépasser, ce que toutes les candidates ont formulé : « Toutes, quand on met le costume on se sent plus belles, on se tient plus droites, ça change, quand on met ça, on rentre dans notre mission ».

Régner : s’investir totalement et assumer le rôle

La gestion de leurs fonctions a de nombreuses conséquences pour ces jeunes femmes d’aujourd’hui. L’aspect financier est une contrainte, mais également la gestion du temps et de la fatigue : en effet, la plupart poursuivent des études ou travaillent déjà, ce qui valorise le fait qu’une reine est une femme de son temps, à la « tête bien pleine », encline à faire des sacrifices.

La Reine d’Arles est perçue comme la personne qui doit « faire perdurer ». Elle a un rôle essentiel de transmission et de représentation. Le costume se trouve à l’interface de l’identité individuelle et de l’identité collective. La portée symbolique de ces jeunes filles élues se trouve au croisement de ce qu’elles sont, de la représentation qu’elles donnent et du crédit accordé par les « autres » à cette représentation. 

Angèle Vernet, première Reine d'Arles
Angèle Vernet, première Reine d'Arles. Fonds Ferriol.
Angèle Vernet, première Reine d'Arles. Fonds Ferriol.